30 mars 2013

Les Mayas se sont trompés de 3 mois

Lundi 25 Mars

Rien de bien passionnant depuis ma belle sortie de vendredi (oui, vous pouvez me piquer des photos si elles vous font envie), hormis un vaccin pour Gab (et un original bonhomme ballon en gant de latex gonflé part la gentille infirmière pour saluer son courage) et un sandwich préparé pour le cours d'anglais de Geoffrey pour apprendre à dire bread, cheese, butter,.... (et vu l'accent qu'il a, il va falloir en préparer beaucoup, je vais pouvoir ouvrir une sandwicherie à mon retour, je maîtrise).

Le ciel est gris et menaçant, il y a du vent, une petite pluie très fine (même pas mouillée pour ainsi dire) qui m'accompagne à l'école. Depuis que je suis ici, je n'ai plus l'habitude de regarder ce que prévoit la météo, vu que c'est tous les jours quasi la même chose (je serais pourtant bien curieuse de savoir à quoi ressemble l'Evelyne Dhéliat locale). En général, en milieu de matinée, les nuages laissent la place au soleil, mais là, ça ne semble pas vouloir être le cas. A peine rentrée, la pluie commence à tomber pour de bon, mais alors vraiment ! Moi pas paniquée, j'ai un chapitre de blog à écrire, toutes les conditions sont réunies, il fait moche (je ne serai pas distraite par le soleil), j'ai l'ordi pour moi toute seule, personne dans les pattes. Et ça tombe, ça tombe, des seaux, des rafales de vent, l'orage se rajoute. En milieu de matinée, Raf me téléphone, un message est passé, les écoles Kessel et Dolto sont évacuées, il faut chercher les enfants. Pour St Ex, on ne sait rien. Je téléphone à 2 copines pour avoir plus d'infos, la première ne sait rien, la seconde me confirme qu'il faut aller chercher les enfants dans les écoles ! Je fais le relais pour la première, je m'équipe (mouais, si j'avais su, j'aurais acheté des bottes en caoutchouc, même si c'est pour une fois dans l'année) et je pars. Pas rassurée tout de même, des flaques commencent à se former partout, le ciel a une drôle de couleur genre "fin du monde", tout le monde roule au ralenti, phares allumés et essuie-glaces en action (qui grincent par manque d'exercice physique, ben oui, comme les bottes en caoutchouc, on ne s'en sert qu'une fois l'an). L'entrée de la cour de St Exupéry est noyée, on a de l'eau jusqu'aux chevilles déjà, la sensation de pieds avec chaussettes et baskets dans cette eau marron est ... comment dire ? Très désagréable ! Je vous le dis, une mère ne doit avoir peur de rien et faire preuve d'abnégation. Comme le dit si bien notre chère Reine Elizabeth "Never complain, never explain" (j'en aurais bien besoin, du flegme britannique, et pas à dose homéopathique, mais de suite en intraveineuse et à haute concentration). Je récupère Gab, l'ordre d'évacuer n'a pas été donné, mais les parents ont pris les devants et se sont précipités sauver leurs chères têtes blondes d'une séance de spa forcée. Je porte Gab jusqu'à la voiture (en plus il n'avait pas de chaussettes ce matin-là) et direction le centre ville pour récupérer Geoffrey.
Certaines rues sont presque inaccessibles, les sols si secs ne peuvent pas absorber autant d'eau en une fois, et les bouches d'égouts sont trop peu nombreuses. La route est noyée sous l'eau, on perd tous ses repères, on ne voit plus ni les trottoirs, ni les trous. On roule au milieu d'un petit fleuve, et on en profite pour remercier l'inventeur des 4X4, car l'eau arrive à hauteur des roues. Et on croise les doigts (et les orteils) pour arriver entier (essayez de conduite avec des pieds, des chaussettes et des baskets gorgées d'eau). Ma peur c'est de tomber en panne, moteur noyé au milieu de la route sous le déluge. Quelqu'un aurait-il le 77 de Noé ? (Oui, ici les portables commencent par 77 en guise de 06). En plus, si des rues sont barrées, je suis mal, je ne connais qu'un seul chemin pour l'école, manquerait plus que je me perde ! Mais j'arrive à bon port (là c'est le cas de le dire), je porte à nouveau Gab, ici c'est encore pire. Je ne sais pas où est la classe de Geoffrey, je monte un escalier vers les premières classes de CE2 pensant le trouver là, mais non, c'est en bas, toujours Gab dans les bras, mes baskets floc floc aux pieds et ... mon portable qui sonne (toujours au mauvais moment celui-là). C'est Raf, l'école vient de lui téléphoner, je dois aller chercher Geoffrey (oui, ça j'étais déjà au courant, désolée, je ne peux pas aller plus vite, j'ai une voiture pas un hors-bord). Inutile de descendre par le chemin le plus court, sous peine de me noyer, il faut rebrousser chemin par là où je suis montée. Je trouve enfin ma progéniture, il ne reste que 3 enfants dans la classe. L'eau est entrée dans la salle (comme chaque fois qu'il pleut un peu trop), il y a eu coupure de courant. Et c'est reparti vers la sortie, toujours avec ma charge de 17kg dans les bras, plus une de 25kg accroché à mon t-shirt. Je les porte tous les deux du portail à la voiture, il s'agit maintenant  de rentrer. Toujours pas de visibilité sur la route, est-ce qu'on va heurter un trottoir, se prendre un gros cailloux ou  une crevasse, mystère ?! Et bien sûr, tous les détritus qui flottent et dérivent. Les enfants ne sont pas plus paniqués que ça, je pense l'être plus qu'eux. Sur le chemin du retour, c'est du délire, à certains endroits, les gens ont de l'eau jusqu'aux genoux . Le parking en face de l'école Kessel est noyé, les gens ont à peine eu le temps d'enlever leur matériel de cuisine (le coin sert de cantine à ciel ouvert), certains se sont mis à l'abri un peu plus haut, d'autres pataugent dans cette eau insalubre et boueuse. Nous arrivons à la maison, sains et saufs, coup de fil rapide à Raf pour le rassurer. Dans l'après-midi, le ciel va se dégager, le soleil revenir et les températures monter. Un arbre en face de chez nous est tombé, vraisemblablement fendu par la foudre, et les hélicoptères vont intervenir de nombreuses fois durant la journée pour aller secourir beaucoup de personnes. Au final, nous allons apprendre qu'il y a malheureusement quelques morts, blessés en disparus. Il parait que ce genre d'intempéries arrive environ tous les 10 ans (la dernière du genre datait de 2004, je l'avais évoqué dans l'Oued d'Ambouli). La nature nous rappelle à l'ordre de façon brutale certaines fois, malheureusement.


Journal La Nation

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire